CHAPITRE XXVIII
Kirtan Loor leva la main pour se protéger du nuage de poussière soulevé par l’atterrissage de la navette. Le Sipharium se stabilisa et la passerelle se déploya.
L’agent de renseignement sourit en apercevant le commandant de la base sur les escaliers de la plateforme d’atterrissage.
— Vous êtes venu me souhaiter bon voyage ? Je suis flatté.
Derricote lui retourna son sourire.
— Votre visite n’a pas été si désagréable, agent Loor. Tenez, un souvenir de votre séjour, ajouta-t-il en lui tendant une bouteille.
— Du Réserve de Whyren ! Diantre. L’avez-vous empoisonné afin de vous débarrasser d’un gêneur ?
— Si vous voulez l’ouvrir et le déguster, je me joindrai à vous. Il n’est pas empoisonné. C’est un cadeau pour vous remercier d’être venu me voir. Sans vous, les Rebelles m’auraient peut-être pris par surprise. Le résultat aurait sans doute été le même, mais on ne sait jamais. J’ai également apprécié que vous jouiez de votre influence pour faire transférer sur ma base un escadron de chasseurs Tie de l’Éviscérateur, en attendant que je puisse remplacer mes vaisseaux.
Kirtan eut l’air surpris.
— Vous ne craignez pas que je puisse vous mettre en danger quand j’arriverai au Centre Impérial ?
Je savais que je ne pourrais pas garder longtemps mon secret. Mais vous saurez l’utiliser dans votre propre intérêt. Donc, vous ne me sacrifierez pas inutilement. Mon vieux, si je vous avais considéré comme une menace, vous n’auriez pas survécu à l’attaque de l’Alliance.
Bien vu !
— J’accepte votre cadeau…
Mais je le ferai analyser avant de le boire.
— J’espère que vous accepterez ce que je vais vous dire. L’Empire est fichu. J’ignore ce qui le remplacera. Mais je suis sûr que le Centre Impérial sera détruit. Si vous avez besoin d’un refuge, souvenez-vous que je serai là.
— Merci, général. Je m’en souviendrai. Et je sais où vous trouver.
— Bon voyage, agent Loor.
Kirtan leva la bouteille.
— À notre prochaine rencontre !
Wedge n’avait pas éprouvé un tel enthousiasme depuis Endor. Il jeta un coup d’œil au général Salm, assis de l’autre côté de la table de conférence. Le plan qu’ils avaient élaboré au cours de la semaine précédente pouvait marcher, mais il était risqué et dépendait énormément du minutage des opérations.
La porte de la salle de réunion s’ouvrit, laissant le passage à Ackbar.
— Qu’avez-vous concocté, tous les deux ?
Salm sourit et appuya sur les touches de son bloc-notes électronique, activant une projection holographique.
— Un moyen de prendre Lunenoire !
— Je ne me souviens pas qu’on vous ait révélé de quel monde il s’agit.
— On ne nous l’a pas dit. Comme prévu, les coordonnées ont été effacées des mémoires de nos ordinateurs de navigation et de nos astromechs. Mais un des astromechs de mon unité a un programme spécial d’enquête judiciaire. Il a pour objet de réunir des preuves. Dans ce cas précis, il a aussi déniché une carte stellaire du secteur.
— Il faudra faire quelque chose pour neutraliser ce droïd…
— Je suis d’accord, amiral, intervint Salm. Mais sa présence dans l’unité du commandant Antilles nous a permis de savoir pourquoi l’attaque a échoué, et comment nous pouvons prendre Borleias.
Wedge montra le champ stellaire holographique.
— Ordinateur, sélection de la triade.
Les trois étoiles centrales devinrent plus brillantes.
— Ces trois systèmes sont Mirit, Venjagga et Pyria. Celui du centre, Venjagga, abrite la base de l’Éviscérateur, Jagga-Deux. Le superdestroyer est là pour protéger l’usine de production de missiles.
Salm montra un des autres systèmes.
— La base abandonnée d’Ord Mirit se trouve dans le système de Mirit. Elle est trop éloignée pour que nous l’utilisions comme nous avons fait avec Ord Pardron.
Enfin, il y a Borleias. Nous avons découvert que la puissance défensive de la planète avait été sous-estimée. Les informations provenaient de dossiers piratés par les Bothans dans le réseau de communication impérial. Elles étaient incomplètes.
Wedge hocha la tête.
— Nous avons exhumé d’anciens dossiers concernant Borleias. Ils nous ont donné la réponse aux questions qui n’ont pas été posées au moment de la préparation de la mission. Avant la création de l’Empire, Alderaan Biotics avait installé sur la planète une usine disposant d’une station d’énergie géothermique et d’un spatioport privé souterrains.
— Pourquoi n’y avait-il aucune information sur cette usine dans les dossiers impériaux, général ?
— L’installation est fermée depuis des lustres. Nous soupçonnons le commandant actuel de la base, Evir Derricote, de l’avoir remise en fonction et de fabriquer des marchandises vendues au marché noir aux réfugiés d’Alderaan. Ses supérieurs ne verraient pas ça d’un très bon œil. Il leur a sûrement caché l’existence de sa petite « entreprise ».
— Vous pensez que cette usine a produit l’énergie utilisée pour renforcer les boucliers de la base ?
— Oui, monsieur, fit Wedge en désignant la fine ligne rouge qui reliait la base et les installations de Biotics. Un tunnel relie les deux installations. Le seul point faible est une tranchée où les deux côtés du tunnel sont connectés par un conduit en ferrobéton. Le générateur est enterré si profondément qu’il est hors d’atteinte des torpilles à protons. De plus, si nous voulons utiliser la planète, le détruire serait absurde.
Ackbar se tapota la lèvre inférieure avec une main-nageoire.
— Si nous coupons la connexion avec la base militaire, nous reviendrons à la puissance estimée par les Bothans… Mais il reste le problème de l’Éviscérateur.
— Pas s’il arrive trop tard, dit Salm. Notre plan est le suivant : simuler une attaque à Jagga-Deux. Nos vaisseaux arriveront dans le système au bord du puits de gravité créé par la septième planète, une géante gazeuse. Quand l’Éviscérateur les détectera, il lui faudra au moins deux heures pour atteindre la position. Quand il sera sur le point d’attaquer et aura déployé ses Tie, nos vaisseaux passeront en vitesse-lumière. Les destroyers partiront pour Ord Mirit et les chasseurs pour Borleias, L’Éviscérateur ne pourra pas suivre les destroyers à cause de sa position dans le système et de la présence de planètes agissant comme des Interdicteurs naturels.
Ackbar plissa les yeux.
— Dans ce cas, il suivra les chasseurs.
— Sans ses Tie ? Non. Les Tie ne peuvent pas entrer directement dans l’hyperespace comme nos chasseurs. Les récupérer prendra du temps. De plus, il paraîtra évident que la ruse avait pour objectif de tenir l’Éviscérateur éloigné d’Ord Mirit.
— Pourquoi le capitaine de l’Éviscérateur penserait-il qu’il y a quelque chose de valeur à Ord Mirit ?
Wedge sourit.
— Nous avons demandé aux pirates informatiques bothans d’introduire de fausses données dans les réseaux impériaux, suggérant qu’une installation secrète, sur Ord Mirit, saurait comment retrouver la flotte Katana.
La flotte Katana avait existé, mais elle était entrée depuis longtemps dans la légende. Composée de plus de cent vaisseaux, elle avait jadis effectué un vol hyperspatial dont elle n’était jamais revenue.
Celui qui posséderait cette flotte serait virtuellement le nouvel Empereur.
— Aucun officier impérial ne refuserait de tenter sa chance, si minime soit-elle, de retrouver la flotte Katana. L’Éviscérateur partira pour Ord Mirit, cela ne fait aucun doute. Ord Mirit est à douze heures de Borleias, non ?
— Ajoutées aux quatre heures qui séparent Venjagga d’Ord Mirit, cela nous laisse seize heures pour prendre Borleias, Le raid se déroulera comme suit : l’Escadron Rogue attaquera et fera sauter le conduit. Pendant que nous attirerons l’attention sur nous, le lieutenant Page et ses soldats, ainsi qu’un certain nombre d’unités similaires, s’infiltreront dans la base et la mettront hors de combat. Ils démoliront aussi le spatioport de Biotics. Puis mes chasseurs repartiront.
— À ce moment, l’arrivée de mes Défenseurs et des autres vaisseaux venant de Venjagga permettra de distraire suffisamment les Impériaux pour que les unités de Page envahissent la base sans l’endommager.
— La sécurité devra être resserrée lors de ce retour à Lunenoire, dit Ackbar.
— Oui, monsieur. Mais nous avons un certain nombre d’avantages. Derricote ne pensera pas nous voir revenir si vite, surtout au moment où la position de la lune bloque notre vecteur de sortie. Nous préparons un package de simulation pour camoufler l’identité de notre cible. Nos pilotes ne sauront pas où ils vont, mais ils seront informés de ce qui les attendra quand ils arriveront.
Le Calamarien hocha la tête.
— Il faudra cacher tout ça à votre second.
— Je sais, et lui aussi. Il ne fera pas partie de l’opération. Et il a accepté de ne pas être informé.
— Je pense que le plan est bon, mais il peut encore être amélioré. Quelque chose me tracasse, commandant Antilles. Au sujet de votre escadron et de l’infanterie.
— Oui ?
— Si les opérations sont lancées simultanément à Venjagga et Borleias – ce qui me semble aller de soi pour que l’Éviscérateur n’ait pas le temps de prévenir Borleias –, l’arrivée de nos renforts prendra au moins quatre heures. L’autonomie des combinaisons de vol est de trois heures. Si un homme reste en arrière, il sera condamné.
— Je le sais, monsieur.
— Et vos pilotes ?
— Ils en seront informés avant de se porter volontaires. Je n’ai que six vaisseaux en état de vol.
— Examinons tout ça encore une fois, dit Ackbar. Il faut nous assurer que les bénéfices vaudront les pertes. Je pense pouvoir faire accepter le plan par le Conseil Provisoire, mais quelques modifications s’imposent. Si tout va bien, le chemin de Coruscant nous sera finalement ouvert.